Faut-il mouiller le feuillage lors de l’arrosage des arbres ?

1. Évaluer le risque phytosanitaire

La question de mouiller ou non le feuillage lors de l’arrosage dépend fortement du contexte phytosanitaire.

De nombreuses maladies cryptogamiques (fongiques), notamment l’oïdium, le chancre, la tavelure ou encore la cloque du pêcher, se propagent principalement au printemps par des spores véhiculées par le vent. Ces spores infectent généralement la jeune végétation, plus sensible à ces attaques.

Ce phénomène est connu sous le nom d’infections primaires, qui ont lieu principalement de fin d’hiver jusqu’à mi-juin.

Voir les Fiches Pratiques sur la santé des arbres : « Parasitologie des arbres » et « Protection sanitaire : comment la raisonner ?« 

2. Risques liés à l’humidification du feuillage

Durant cette période critique (fin d’hiver jusqu’à la mi-juin), l’humidification du feuillage est à éviter, car elle favorise le développement des pathogènes fongiques.

Par exemple :

  • L’oïdium (Erysiphales spp.) se développe avec une hygrométrie élevée (mais sans nécessiter de pluie directe) et des températures modérées à élevées (entre 20 et 27 °C) [Gadoury et al., 2012, Annual Review of Phytopathology].
  • La tavelure du pommier (Venturia inaequalis) nécessite une humidité libre sur les feuilles pendant plusieurs heures pour permettre la germination des spores [INRAE, 2021 ; MacHardy, 1996, Apple Scab: Biology, Epidemiology, and Management].

Les instituts de recherche tels que l’INRAE ou le Réseau Dephy utilisent d’ailleurs des modèles épidémiologiques (ex. : courbes de Mills) pour prédire les périodes d’infection en fonction de la température et de l’humidité.

🔺 Recommandation : Évitez de mouiller le feuillage pendant cette période critique, surtout en cas de conditions :

  • d’humidité élevée (ou hygrométrie > 70 %) ;
  • de températures supérieures à 20 °C.

3. En dehors de la période de risque : un arrosage libre

À partir de mi-juin jusqu’à la chute des feuilles des espèces feuillues, si aucune infection primaire n’a été observée, le risque phytosanitaire diminue fortement. En effet, les champignons pathogènes ne se propagent plus par le vent mais principalement par ruissellement de l’eau ou contacts directs.

Durant cette période, il est tout à fait possible de bassiner le feuillage, sans risque d’infection majeure, notamment si des traitements préventifs ont été réalisés et que les conditions météorologiques sont peu favorables au développement fongique.

Infection eau ruissèlement

✅ Recommandation : Vous pouvez bassiner librement le feuillage, même en journée. Aucune contre-indication sanitaire si le feuillage est sain.

4. Repenser les idées reçues : effet loupe et choc thermique

Fausse croyance : effet loupe et brûlure des feuilles

Goutte d’eau sur feuillage

⚠️ Contrairement à certaines croyances, le soi-disant effet de loupe causé par les gouttes d’eau sur les feuilles exposées au soleil est un mythe.

Des études optiques ont montré que les gouttelettes ne focalisent pas suffisamment la lumière solaire pour provoquer des brûlures [Horváth et al., 2010, New Phytologist].

Pas de stress thermique à craindre

Stress thermique ?

🌡️ Quant au choc thermique (arrosage à l’eau froide en pleine chaleur), les végétaux tolèrent très bien les variations rapides de température, en particulier les espèces ligneuses.

Au contraire, un bassinage en période chaude peut même favoriser la régulation thermique des feuilles par évaporation, en diminuant la température foliaire [Taiz et al., 2015, Plant Physiology].

Références bibliographiques

  • Gadoury, D.M., Seem, R.C., Ficke, A., & Wilcox, W.F. (2012). The epidemiology and management of powdery mildew on grapevine. Annual Review of Phytopathology, 50, 1–24.
  • MacHardy, W.E. (1996). Apple Scab: Biology, Epidemiology, and Management. APS Press.
  • INRAE (2021). Tavelure du pommier – Biologie et modélisation. https://www.inrae.fr
  • Horváth, G., Gál, J., & Száz, D. (2010). Lens effect of water drops on leaves: myth or reality? New Phytologist, 187(3), 678–686.
  • Taiz, L., Zeiger, E., Møller, I.M., & Murphy, A. (2015). Plant Physiology and Development (6th ed.). Sinauer Associates.

0 commentaires

Soumettre un commentaire

Autres Fiches Pratiques pouvant vous intéresser…

Le Kiosque des Compagnons vous propose…